samedi 26 février 2011

L'épilation masculine et ses tabous

Pour rentrer un peu dans mon intimité, je dois reconnaître m'adonner deux fois par an à une activité peu masculine: l'épilation à la cire. Des poils trop abondants aux aisselles et trop disgracieux dans le bas du dos m'ayant valu des activités lubriques raccourcies à un trop juste minimum, mon statut de célibataire parisien m'oblige à cet exercice un brin maso.

J'avais pris l'habitude de mener à bien cette mission auprès d'un petit salon de coiffure à côté de chez moi, disposant d'un espace épilation. L'esthéticienne pratiquait le posé-arraché de cire comme ma grand-mère dépeçait les lapins: avec des gestes précis, mesurés et une distance sur sa tâche qui lui permet de régler l'affaire en quelques minutes, et passer tout de suite à autre chose. Je dois dire que ça m'allait très bien: simple et efficace, pas cher de surcroit, et en prime les yeux doux et les gestes d'attention un peu trop marqués de la patronne pour me recevoir (C'est un peu mon problème: mes hormones semblent en parfaite adéquation avec les récepteurs sexuels des patronnes de salons de beauté quadragénaires).

Seulement voilà, lors de mon dernier RDV, j'arrive dans le salon en plein rush , on me fait poireauter 15 minutes, avant de laisser passer quelqu'un avant moi. J'aime pas qu'on me prenne pour un con. Je quitte alors l'établissement, et me mets en quête d'un nouveau prestataire. A Paris, fais comme un Parisien, me dis-je, et je trouve donc un salon, uniquement pour homme. Bien curieux de voir le phénomène, je me rends d'un pas alerte au salon.

A peine arrivé, je suis reçu par la patronne: 40 ans environ, bien apprêtée, bien gaulée, avec un jeans qui lui fait un cul de minette de 20 ans. "Mettez vous à l'aise, je m'occupe de vous tout de suite!". Je perçois dans son regard un intérêt qui semble dépasser celui de la conquête d'un nouveau client, et pense très fort, en la voyant se déhancher dès qu'elle fait un mouvement derrière son desk, qu'elle a tout de la patronne qui se fait racasser dans la cabine du fond 3 fois par jour. Cette pensée m'amuse beaucoup, et laisse transparaître un air amusé, qu'avec du recul elle a dû prendre pour un air lubrique.

On me laisse patienter 2 minutes, puis mon cougar revient, et me déclare avec une assurance qui m'amuse de moins en moins "C'est à nous, suivez-moi!". Je la suis en calquant mon pas sur le rythme du rebond de ses fesses dans son Levis (je connais à ce moment non seulement la marque du jeans, mais aussi les moindres détails postérieurs). J'aperçois alors le couloir, avec 4 cabines de chaque côté, et une association d'idées m'envoie quelques secondes dans un obscur bordel en Asie du Sud-Est, où la patronne, qui n'assurerait plus que le relationnel client, aurait décidé de reprendre du service, en se disant qu'un petit jeune un peu musclé la dégourdirait.
En observant ce couloir, je me rends compte du piège tendu: sur 8 portes, 7 sont closes, seule est ouverte celle de la cabine la plus isolée, au fond, dans un coin.
L'hameçon aux gros ardillons.

Elle me laisse m'installer (notez que je me méfie des gens chez qui le verbe "s'installer" est synonyme de "se déshabiller") dans ma petite cabine confortable. Tellement confortable que le porte-manteau fixé au mur propose un peignoir façon club échangiste. Là je m'imagine à quoi pourrait ressembler ce lieu passé 23h. Elle revient pour me trouver en caleçon et chaussettes, essayant de faire descendre la tension sexuelle qui s'installe dès qu'on est à moins de 2 mètres l'un de l'autre.
Peine perdue.

"Par quoi on commence?" "Commencez par le dos." Sous-entendu on finira par le moins sexe, histoire que je reparte sans griffure. Je m'allonge sur le ventre et elle s'exécute avec un soin et une attention toute particulière, sauf au moment de me faire comprendre qu'elle préfère voir mes fesses, et fait descendre mon caleçon d'un coup sec au-dessous de mes fesses. "C'est mieux comme ça!" affirme-t-elle avec un aplomb qui me laisse pantois. Après l'arrachage de la cire, son badigeonnage de crème apaisante s'est avéré plus digne de l'établissement oriental de mes pensées que d'un centre de soins ordinaire.
Tiens, elle a rien arraché là... là non plus... Ouuuuuuuuuuuuuuuuuh, certainement pas là.
Bref, je commençais doucement à me laisser amadouer, lorsqu'elle me glisse un "Vous avez vraiment un dos superbe!", tout en suivant les lignes de mes muscles avec une dextérité qu'on observe que chez les expertes du corps masculin. Je grommelle un truc qui n'aspire aucune réponse, façon tais-toi et continue.
Une fois finie son analyse détaillée de mes parties postérieures, on passe aux aisselles. Là, elle devrait se détendre.
Nouvelle erreur.

C'est difficile à expliquer comment, mais elle a réussi le tour de force de rendre l'exercice extrêmement sexué. Elle m'a fait tenir 20 minutes, allongé sur le dos, les bras croisés derrière la tête ("si, si, les 2 en même temps, c'est important"), histoire de me mettre dans une position de soumission. Installée derrière ma tête elle a laissé se balader ses mains sur à peu près toute zone de mon torse et mes bras, et de procéder au massage réparateur comme il se doit. Malheureusement pour moi, il m'est difficile de maîtriser une érection avec une femme qui me caresse sur tout le corps et qui a les yeux rivés sur mon caleçon. Renoncer à toute émotion visible aurait consisté à penser à autre chose, mais ça il n'en était pas question. J'ai donc réussi à contenir l'émotion à son minimum socialement acceptable dans de telles circonstances.
Ca y est, c'est fini. J'ai tenu le coup. Je ne suis pas le taucard cliché qui va se faire épiler et baise la patronne dans la cabine du fond.

...

"-Attendez, il faut que je finisse avec les tout petit poils dans la nuque et sur épaules!
-??..."
Selon ses ordres, je m'assois donc au bord de la table, avec une lampe façon table d'opération qu'elle rapproche de mon dos. Elle se pose debout face à moi et va chercher les poils disgracieux de ma nuque, en regardant par-dessus mon crane. Je vous laisse imaginer ce que j'avais en face des yeux. Les 10 minutes qu'a duré cette opération, mon nez à touché 3 fois ses seins. Dans le même temps, si j'avais bien suivi, 3 clients étaient sortis du salon, et pas un n'était rentré. Pas un bruit non plus provenant d'une activité quelconque de sa collègue. Je n'entendais plus un autre bruit que sa respiration, proche de mon oreille, qui me parvenait comme un souffle rauque en demande de sexe animal. Nous étions seuls, et elle ne me laisserait pas partir comme ça.


Je ne suis qu'un faible.

Elle m'a sauté dessus telle une féline qui ne relâche pas sa proie, et mon seul acte de rébellion a consisté à prendre le contrôle des opérations. Après avoir vidé la réserve de cire et cassé la table de soins, elle m'invita à découvrir leur espace jacuzzi, qu'elle avait doucement parfumé de senteurs aphrodisiaques. Enfin, je découvris leurs douches à jets massants.
Deux heures après mon arrivée, je ne savais plus très bien pourquoi j'étais venu ni même où j'habitais. Le temps de retrouver mes esprits, je disposai donc de Madame, repue et satisfaite d'une mission parfaitement accomplie.


C'est décidé, je ne remets plus jamais les pieds dans un centre de soins pour homme.

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